
Argonne
Grégory Dargent : guitare électrique et théorbe
Barbara Hünninger : viole de gambe
Maritsa Ney : violon
Jean Louis Marchand : clarinettes et compositions
Elodie Peudepièce : contrebasse
Christophe Rieger : saxophone
Mon arrière grand père, Louis Gayrard nait dans le Tarn en 1894. A 22 ans, il devient chasseur alpin dans un régiment à Nice et il est envoyé en renfort dans le nord est de la France en 1915 contre l’offensive allemande. En 1917, il est blessé lors d’un combat et perd une jambe. Après la guerre, Il s’installe dans l’Aisne ou naitra en 1926 sa fille Yvette, ma grand mère. Suite à des problèmes de santé, il est transféré au préventorium des Islettes, en Argonne, ou l’air est réputé meilleur. La famille s’y installe et Louis devient gardien du cimetière militaire. En 1918, dans cette même Argonne, précisément à Futeau, un village voisin, nait mon grand père Jean Marchand. Jean et Yvette se rencontrent et se marient le 16 décembre 1944 aux Islettes. Mon père y nait le 30 mai 1945, 3 semaines après l’armistice. Mon grand père apprend le saxophone et devient musicien de bal amateur dans la région, tout en travaillant à la tuilerie des Islettes, située au bord de la Biesme, un affluant de l’Aisne, qui balise la frontière entre Marne et Meuse. Louis meurt un an avant ma naissance, en 1978, et il est enterré dans son cimetière, aux Islettes. Durant les années 80, je grandis en écoutant Jean jouer des valses à la fin des repas des rendez vous de famille. Je grandis en venant régulièrement aux Islettes saluer mes aïeux, marcher jusqu’au cimetière, sur le chemin de la noue ou vers la fête au village, déjà dépourvue de bals. A la fin des années 90, Jean me lègue un carton rempli de partitions de ses musiques à danser. A la fin des années 90 également, j’apprends à conduire et le déménagement de ma soeur dans le Béarn nous pousse à traverser la France régulièrement. Passer la ligne de partage des eaux, passer l’Auvergne, chez Florent mon frère de coeur, s’arrêter dans le Tarn, chez Augusta, une cousine de ma grand mère dont je fais enfin la connaissance. Un lien profond nous rapproche, les cultures populaires auvergnates et occitanes, le folklore… Le folklore, ca y est, le lien est fait avec ce collectif dont j’ai déjà entendu parlé, l’ARFI, cette drôle d’association à la recherche d’un folklore imaginaire. Et ces musiciens qui deviennent des maitres pour moi, Louis Sclavis, Alain Gibert, Michel Portal, Henri Texier, Jacques Di Donato, Bernard Lubat… Début 2000, je décide de créer l’ensemble Les Petits Pas Dans Les Grands afin de jouer et de faire résonner les musiques de bal de mon grand père. Et puis entre 2001 et 2020, je compose un certains nombre de thèmes pour des occasions aussi belles que furtives : des musiques pour le théâtre, pour des projets de films, pour la célébration du mariage de ce frère de coeur auvergnat, pour la nouvelle maternité de ma soeur… On enterre aussi dans ces années là mes grand parents au cimetière des Islettes, pas très loin de la tombe de Louis. Des valses résonneront encore dans ces tristes moments. En 2025, je décide de reprendre toutes ces musiques composées pendant 19 ans, de les arranger et les faire jouer par ce nouvel ensemble instrumental franco belge que j’imagine comme une conséquence maturée des Petits Pas Dans Les Grands, à l’image de ce que je suis aujourd’hui. C’est la naissance d’Argonne. Jean Louis Marchand novembre 2025